Interview de Guillaume Villemot, fondateur du Festival des Conversations
Interview de Guillaume Villemot, fondateur du Festival des Conversations Par Pascal Bruno, animateur du Bistrot du Cours, café philo et citoyen à Ajaccio. Pourquoi avoir lancé le Festival des Conversations ? Alors que nous sommes de plus en plus connectés les uns aux autres,nous n’avons paradoxalement jamais été aussi seuls. Quand j’entends des enfants... View Article
Interview de Guillaume Villemot, fondateur du Festival des Conversations
Par Pascal Bruno, animateur du Bistrot du Cours, café philo et citoyen à Ajaccio.
Pourquoi avoir lancé le Festival des Conversations ? Alors que nous sommes de plus en plus connectés les uns aux autres,nous n’avons paradoxalement jamais été aussi seuls. Quand j’entends des enfants dire qu’ils ont des conversations avec Siri sur leurs iPhone, je me dis qu’il est temps d’agir. C’est ainsi que le Festival est né et se développe. La bonne nouvelle, nous avons trouvé des personnes qui font la même chose que nous ailleurs. Par exemple, les Free Convo aux USA (http://freeconvo.com/). Le Festival appartient à tous ceux qui comme vous veulent redonner le temps de la parole à tous. Sentiez-vous chez les citoyens que nous sommes, une envie, un besoin, prêts à se libérer ? Plutôt une peur croissante au contraire, d’oser parler directement à l’autre, de se livrer. Nous nous protégeons de plus en plus. En même temps, sur les réseaux sociaux, chacun raconte sa vie ou la vie qu’il voudrait avoir. Que recherchez-vous à travers ce festival ? Faire que des gens se disent : « Tiens c’est vrai, c’est simple de prendre le temps d’écouter l’autre et de lui répondre. » Moi quand j’observe les effets que peuvent avoir de simples conversations autour de soi, j’ai juste envie d’y replonger. D’où vous parlez, que voyez-vous de la Corse, de notre société insulaire souvent accusée d’omerta par certains observateurs « avertis » ? La Corse n’est pas une île mutique. Au contraire, le verbe y est puissant, la parole appréciée. C’est une société prolixe pour qui sait, et qui veut, l’entendre. Là encore, il faut savoir prendre le temps d’écouter, y compris les silences. Je pense à cette phrase d’Hemingway : « On met deux ans pour apprendre à parler mais cinquante ans pour apprendre à se taire. » Sans conscience et vérité, les conversations ne sont-elles pas vouées à se détourner vers les échanges virtuels et à garder les humains dans des « grottes de silence » ? Les conversations sont désormais polymorphes. Il y a celle où l’on se voit, s’entend, se sent, se touche. C’est la plus riche selon moi. Aujourd’hui, il existe beaucoup d’autres moyens d’avoir une conversation. Je pense au téléphone portable ou à Internet. Encore faut-il maîtriser les usages de ces nouveaux modes conversationnels et, surtout, se poser la question de l’intérêt, des limites voire des risques de ces canaux. La politique spectacle alimentée par les conversations pourrait-elle se métamorphoser en politique instruite par les conversations citoyennes ? Les politiques se montrent incapables de conversation véritable. Je rêve d’un débat entre deux leaders opposés qui, au-delà de leurs divergences compréhensibles, pourraient se dire : « Votre point de vue est intéressant. Je vous entends. »
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